Charon le Passeur

Alors que d'un noir écarlate se dresse le plafond des enfers, solide rempart, ultime protection du monde des humains, regardant s'écouler le fleuve de son eau limpide, une statue de pierre. Grisonnante et grenue, d'un froid à en glacer le plus ardent des cercles inférieurs, s'élève la représentation du someil de Charon, encapuchonné dans son voile le masquant totalement.

Parmi les plis de sa large cape, et l'écho des flots ruisselants se tend sa main pâle timidement tirée hors du drap de pierre. On raconte que Charon fut autrefois un démon au pouvoir extraordinaire, il avait la capacité de créer à sa guise des brèches vers le monde des humains. Il lui suffisait de mettre pied sur sa barque et de traverser le fleuve pour laisser s'ouvrir un passage.

Mais, lorsque chevalier noir Sparda scella de ses immenses pouvoirs le passage entre les deux mondes, Charon fut changé en pierre. On raconte aujourd'hui que lorsqu'on verse deux milliers d'Orbes Rouges dans le creux de sa main tendue, le Démon se réveille, et la pierre Grisâtre reprend son aspect de tissus noir, sobre profond. Et qu'en remerciement de ce don, Charon laisse la personne embarquer à bord de son navire et lui crée, d'un simple mouvement de bras une fissure le menant directement au monde des Humains. Ensuite, le ténébreux et muet passeur se désagrège et réapparait en statue de pierre, de l'autre côté du Fleuve, en attendant qu'une nouvelle personne vienne lui offrir ces quelques secondes de vie...

Je suis enfin arrivée avec Passant devant Charon. Sans plus attendre, je déversais à ses pieds les orbes que j'ai pu récolter grâce à ma précédente petite bataille. Je vois une sorte de fumée provenant des sphères rouges se faire aspirer par la statue qui semblait reprendre quelques couleurs, les autres sphères disparraissent progressivement. Charon finit par se pencher et me dire :

- Merci à vous très chère, pour votre présent. Même si je ne comprends pas pourquoi vous m'aviez adressé cette phrase tout à l'heure.
- Laissez tomber, ce n'est rien. Fis-je, mal à l'aise.

Il hoche de la tête et fit un geste dans le vide. Un portail lumineux apparait.

- Merci ! Dis-je.
- Ce fut un plaisir !

Il retourne à son état de départ. C'est à dire, une pauvre créature de pierre. Je regarde Passant, qui n'a pas dit un seul mot durant l'entretien entre la statue et moi, puis le portail. Je concluais, avec soulagement :

- Allons-y.

J'ai hâte de voir Maître Vergil. Mais avant ça, j'ai hâte d'être chez moi, je dois me changer et manger. Passant saute le premier dans le portail, je saute à mon tour après.

La statue de pierre revint à un état d'os de chair et de tissus, debout sur sa barque naviguant sur les eaux tumultueuses du fleuve des Enfers, Charon était comme à son habitude reconnaissant de l'instant de vie qu'il recevait. De sa voix caverneuse et envoûtante il remercia Irina de son offrande après avoir aspiré les orbes déposées à ses pieds. Quand à l'Inconnu, il fit tomber le même équivalent d'Orbes au sol, ces orbes retenues dans sa veste. Charon ne dit rien, et se contenta de hocher la tête. Les deux êtres aux visages invisibles, couvert d'épaisses capuches semblaient déjà se connaitre. Les orbes furent aspirées et "Passant" embarqua.

Les eaux en furie semblaient être incapables d'atteindre la coque de la barque pourtant si frêle, et l'inconnu resta interdit pendant la traversée comme s'il était plongé dans des pensées envoûtantes. Le trio fut bientôt arrivé à destination, et le Passeur, ne perdit pas de temps et traça un cercle dans l'air qui se chargea en runes écarlates qui tournoyaient en formant une zone circulaire de vide, une zone noire. Sans plus attendre, Passant se laissa aspirer, invitant Irina à le suivre. Charon se dématérialisa alors, en une fumée grisonnante, et reprit sa place de statue de l'autre côté du FLeuve...